EXPOSITION UG

 
vis viva 1 UG
vis viva 2 UG
Robot Dancing 2 UG
         
 

La première fois qu’on visita la belle libraigalerie de Jacques Desse à la Goutte d’Or, c’était déjà pour UG, à l’occasion de la sortie de Morse ou de Cinq, un de ses deux livres animés « de commande ». Pour l’occasion, de nombreuses réalisations d’UG, récentes et plus anciennes, étaient exposées à la convoitise sur les rayonnages de la librairie tandis que l’espace d’expo voûté du sous-sol était consacré à une collection de livres très érectiles sinon toujours animés, que n’auraient pas déparé les XXX Rated à foufoune d’UG.

Cette fois-ci, c’est donc à la cave que les pop-ups d’UG nous donnent rendez-vous. Une cinquantaine d’œuvres sont présentées, certaines – nombreuses – pour la première fois. Le dernier-né Cristal est en toute logique très présent, sous forme de maquettes grand format de chacune des animations qui pètent de couleur et de volume bonhomme. L’expo est globalement remarquable d’efficacité, l’éclairage soigné permettant aux découpes de se la jouer expressionnistes en projetant des ombres sur les murs de briques, et donnant aux couleurs saturées des papiers et des encres de faux airs de papillons géants épinglés. Bigger than life !

L’ensemble est jubilatoire, et le côté sculpteur d’UG s’y révèle complètement. Dans une antichambre, une micro-rétrospective de l’« ancien » UG, l’éditeur-sérigraphe des éditions C’BO, époque Hôpital éphémère, fait la part belle au graphi(ti)sme punkoïde. À côté, les dernières réalisations d’UG font presque ascétiques : plusieurs livres en préparation ne sont plus que des jeux de papier, de volume et de couleurs. Plus de texte, plus de graphisme, plus d’impression même, c’est UG dans le plus simple appareil. On pourrait parler de virtuosité si la simplicité, l’économie, l’astuce, l’évidence ne prenait pas toujours le pas sur la prouesse technique gratuite. Chez UG, l’animation – le pop-up – sert toujours le propos, fut-il muet. Le garçon n’a plus à faire ses preuves, à la ramener : il sait où il va, il nous y emmène sans hésiter. Ou plutôt il sait ce qu’il veut et n’hésite pas à aller le chercher, à nous de voir si on veut l’accompagner.

On verra donc des maquettes d’un futur hommage – clin d’œil à l’op’art, avec des volumes arachnéens à la Soto et des jeux de cubes à la Vasarely. Ici, un petit livre – exemplaire unique ! nous fait de l’œil, puis un recueil de tikis en préparation. L’UG dépouillé est tellement efficace que c’en devient frustrant. Sur un autre présentoir, les maquettes d’un futur bouquin sur les dinosaures, en préparation chez Larousse, déploient leurs imparables silhouettes vertes et brunes, aux proportions et aux attitudes si convaincantes, si identifiables en l’état qu’on déplore que l’éditeur ait prévu un illustrateur pour saloper ces petites merveilles. Procès d’intention : on ne sait rien de l’illustrateur, peut-être très bon. Mais les dinos monochromes sont bougrement séduisants.

Comme le sont aussi les maquettes en blanc de Karel Kapek 2, presque inquiétantes une fois dépouillées de leurs oripeaux arlequinesques dignes d’un ensemblier-décorateur des années 1950. Quand on gratte la couleur, on voit les os, les dents, tous les petits trucs un peu méchants, avec des attaches parisiennes en guise de piercing… Et la musique silencieuse du piano à queue de papier, tout blanc comme le smoking de feu Mort Shuman, ne fait rien pour détendre l’atmosphère. Du tragique chez UG ! L’Auguste se fait clown blanc ! Doom Like 1 et 2, c’était pour de vrai ! L’apocalypse de papier est pour demain !

Enfin, pour l’apocalypse on ne sait pas, mais la fin de l’expo était hier. Une expo qui aura permis – dixit Jacques Desse – à des amateurs de livres animés venus suite à la consultation de livresanimes.com de découvrir toutes les facettes de l’univers d’UG, artiste protéiforme et non simple « ingénieur papier », et aux amateurs de graphisme et de livres d’artistes qui connaissent et suivent UG depuis quelque temps de découvrir un nouveau lieu de convoitise à Paris. Un lieu peut-être encore un tantinet discret (on reçoit sur rendez-vous, voisinage tapageur oblige) mais la qualité de l’accueil et la sélection ébouriffante méritent d’être un peu préservés des badauds aux doigts gras et aux commentaires inspirés. Ou l’inverse.

Patrick Gloux

 
         
  Livresanimes.com remercie très chaleureusement Patrick Gloux de sa participation enthousiaste et la Boutique du Livre animé pour son accueil.
Texte © Patrick Gloux / Livresanimes.com
Photos : © UG, Droits réservés, Thierry Desnoues / Livresanimes.com, Boutique du livre animé.